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ET LES JOURS

ma confiance c’est toute entière, quand je la retire…

Le journaliste retourne à son bureau. Il traverse la salle rectangulaire, pauvrement éclairée, au milieu de laquelle une demi-douzaine de petites tables se font face. Quelques-unes portent une dactylotype, les autres sont dans un désordre indescriptible. Il y a de tout : un chapeau désuet, des boîtes vides, des bouteilles, des almanachs, des livres de références et un dictionnaire aux pages écornées. Au fond, sous la fenêtre, un pupitre, fraîchement ciré, luit au soleil.

Le bureau que le rédacteur partage avec Lecerf, donne sur la rue, éclairé par une grande glace garnie dans sa partie inférieure d’un rideau opaque et séparé de la salle par un comptoir et une grille.

Il regarde ses compagnons et se dit : Pour eux rien ne change. Aucun d’eux ne regrettera mon départ. On ne regrette personne dans les journaux. On n’en a pas le temps. Et puis, les journalistes que leur attachement au journal et la misère commune rapprochent quelque temps, sont des individus sans contacts profonds entre eux. Ils viennent de milieux trop différents. Leurs ambitions sont trop différentes.