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ET LES JOURS

Il ne sait pas encore s’il aimera cette maison. Il a envie de crier « Maman », mais une voix d’homme, qu’il ne reconnaît pas, raconte que la veille, la foudre est tombée sur les fils électriques, rue Principale, et ne s’est arrêtée qu’après avoir réduit en miettes trois ou quatre poteaux et tué un cheval. Une autre voix, féminine celle-là, répond. Auguste, craignant d’être surpris en chemise de nuit par des inconnus, retourne dans sa chambre. Où sont donc ses parents et que font ces étrangers dans la maison ?

Il retrouve Claude assis dans son lit, nullement dépaysé par le changement. Claude ne s’attache pas aux choses comme Auguste. Les deux frères présentent un contraste frappant : Auguste est frêle à côté de son cadet. Il ressemble à sa mère dont il a la sensibilité, la finesse des traits et des membres, alors que Claude, qui tient de son père, a déjà les épaules carrées, la tête large et forte. Dans les jeux, Claude bouscule souvent son aîné.

— Viens voir, dit Auguste, rassuré par la présence de son frère.

Claude le rejoint à la fenêtre. L’air est saturé d’humidité comme après un long arrosage. Dans l’herbe des gouttelettes perlent le long de minus-