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coin. Le parquet était couvert de boue, de victuailles souillées, de débris de toutes sortes. Un remugle de boucherie mêlé aux odeurs humaines régnait dans la place.

Une centaine d’électeurs s’emparèrent de moi à la porte aux cris de « Vive Julien Pollender ». J’essayai de me dégager mais ils ne voulaient pas entendre raison.

Avec des chants et des vivats, ils me reconduisirent jusqu’à ma porte. Puis il fallut leur faire un discours pour les disperser.

— Julien Pollender à l’hôtel de ville ! Vive Julien Pollender ! criaient-ils.

Les voisins se montraient aux fenêtres. L’arrivée de mon père mit fin à la manifestation.

Je montai à ma chambre, fit machinalement les gestes de me mettre au lit. Mais je ne pouvais dormir. Je retournai à la fenêtre. Le démon de la politique s’était glissé dans ma chambre. Je me voyais député. Qu’était la gloire littéraire auprès de ce triomphe ? pensai-je.

À midi, je courus acheter un journal. Pas un mot de mon rôle dans la manifestation de la