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tel que le conçoit Ivanoff et celui-ci, refusant de s’avouer vaincu, m’a présenté sous un angle suffisamment ambigu pour que je ne trahisse pas l’idée que, comme lecteur de mes romans, il se fait de moi.

À son habitude, Jeanne rangeait autour d’elle tout en parlant. Georges ne pouvait détacher son regard des photos. Il s’était laissé choir dans un fauteuil, près de la cheminée, et s’attachait à interroger ses traits. Dans l’une des épreuves, on voyait d’abord le torse énorme, puis la tête panachée d’une mèche grise, le front noueux, les yeux profondément enchâssés. Il protesta :

— Ces épaules de docker, ces yeux qui regardent de loin…

Jean descendait à son tour. Il vint rejoindre ses parents dans le salon. Il ressemblait à son père dont il avait les yeux gris, un peu enfoncés dans les orbites, la lèvre généreuse, le teint bistre. Il marchait sur la pointe des pieds, la poitrine rentrée, le corps long et svelte dans son complet brun, trop ample. Quand il réfléchissait, il croisait les mains dans le dos, grand garçon sensible que sa mère avait longtemps tenu en serre chaude. Il préférait la lecture aux exercices de plein air, ne montrait aucune disposition particulière