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ment de chaque côté de l’allée de gravier conduisant au porche à colonnade. L’homme politique aimait le faste et il avait la manie de bâtir. Aussi des groupes d’ouvriers de tous métiers sévissaient-ils à longueur d’année dans cette maison qui comprenait plusieurs grands salons, une salle à manger de vingt convives, des solariums et de spacieux appartements pour les invités. La façade, percée de hautes fenêtres disposées en symétrie, avait gardé l’apparence d’un ancien manoir, mais l’intérieur, à la suite de trop de modifications improvisées et exécutées sans plan d’ensemble, n’avait plus de style. Ainsi, l’habitat ressemblait à l’homme.

Georges Hautecroix poussa la barrière et pénétra dans la propriété. Carrel s’entretenait, près d’un pavillon de construction récente, avec un groupe de couventines d’une quinzaine d’années, vêtues uniformément de jumpers bleus et de chemisiers empesés. Deux religieuses les accompagnaient. Un peu partout, des nappes odorantes de rosiers sauvages embellissaient le versant du coteau. Les fillettes, conscientes de l’intérêt qu’elles éveillaient chez le vieil homme, s’émulaient à retenir son regard, à recueillir de ses lèvres un témoignage de préférence que sans doute elles