Page:Charbonneau - Aucune créature, 1961.djvu/108

Cette page a été validée par deux contributeurs.

il avait ses obligations de famille, réduites au minimum par le séjour des siens à la campagne, mais exigeantes tout de même, ses affaires, le soin de sa carrière…

Sylvie n’était pas capable, croyait-il, de retour sur soi. Les aspirations de l’homme étaient plus complexes. Il devait pour s’accorder à elle se renoncer sans fin. Son amour, sa passion se nourrissaient de sa substance spirituelle.

Depuis qu’il aimait, toute sa vie s’orientait différemment. Avec elle, il avait dû répéter les moindres gestes de son rôle d’amant, si compliqué en comparaison des autres. À cause de cette coupure, de ce partage de son personnage, il perdait possession des choses en même temps que de lui-même. Seules surnageaient les habitudes correspondant à un instinct profond, aux sources vives de l’être. Sa façon de sentir, de s’exprimer, de voir les choses et les gens, même de marcher, de rire, tout en lui s’était métamorphosé.

Ce qui lui répugnait le plus dans l’adultère : l’hypocrisie, la crainte des surprises, des dénonciations, les rencontres à l’écart dans des arrière-ruelles était devenu monnaie courante dans sa vie. Tout ce qui nous arrive nous ressemble, pensait-il, mais il n’avait pas encore