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De trois grosses charrettes, attelées chacune de cinq chevaux et chargées, l’une de poutres et les deux autres de pierres, il n’en est resté trace. J’ai retrouvé un gros essieu, contourné en spirale, au milieu du Champ de Mars : il tenait encore à quelques fragments du moyeu.

Mais ce dont je n’ai jamais pu me rendre raison, c’est la disparition de tous les hommes et animaux qui ont péri sans laisser aucune trace. En parcourant toute l’enceinte, une heure après l’explosion, je n’ai aperçu que deux ou trois cuisses ou bras humains, et pas un vestige de cheval.

Un autre phénomène qui m’a beaucoup frappé, c’est que, parmi les hommes qui en ont échappé, une centaine sont restés sourds et aveugles pendant trois ou quatre mois, et depuis sont guéris.

L’étoile qui me protégeait contre les fureurs de l’anarchie voulut bien encore, par une espèce de miracle, sauver ma tête dans cette circonstance.

Depuis quatre mois, j’allais régulièrement à Grenelle tous les matins à cinq ou six heures, et j’en revenais à neuf ou dix, pour diriger les affaires de l’administration ; j’y retournais à six heures du soir, pour n’en revenir qu’à dix heures.

Pour la première fois depuis quatre mois, j’étais absent ce jour-là : la veille, j’avais été entraîné à la chasse dans le parc de Bercy et n’étais rentré qu’à minuit très fatigué. L’explosion me trouva dans