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traits dont on redoutait l’application, ou pour y intercaler quelque sentence à la louange de Bonaparte. On salariait trois ou quatre poètes, tels que Baour-Lormian, Treneuil, d’Avrigny, Esménard, Étienne, etc., pour chanter, à jour fixe, les exploits du héros et les principaux événements de son règne. Napoléon était tellement ombrageux, il redoutait à un tel point les applications qu’on pouvait lui faire dans la plupart des pièces du Théâtre-Français, qu’il commença par en retirer plusieurs du répertoire, telles que Mérope, la Mort de César, etc., et il ne permit la représentation de quelques tragédies de Corneille qu’après les avoir fait mutiler. Une observation qui n’a pas pu échapper aux hommes capables de juger ses actions, c’est qu’il a constamment prohibé les pièces où il s’agissait de l’usurpation d’un trône, de la punition d’un tyran ou de quelque allusion à la maison de Bourbon. Sa rage contre les Anglais l’avait porté à proscrire tout ce qui rappelait une victoire sur la France, tel que le siège de Calais ou quelque acte de vertu, même privée.