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« — Vous le croyez donc bien nécessaire à la France ? »

« — Ce serait un deuil général s’il venait à nous quitter. »

Napoléon appelle Savary et lui ordonne de ne pas mettre à exécution l’ordre qu’il lui avait transmis le matin. Si j’avais eu l’air de connaître la mesure qu’il avait prise et que je lui en eusse parlé, je n’aurais rien obtenu.


Napoléon a toujours cru pouvoir former l’opinion publique et diriger l’esprit public par les journaux et les spectacles. Aussi avait-il soumis les uns et les autres à la censure la plus rigide ; non seulement on exerçait la censure sur les pièces nouvelles, mais on donnait des sujets à traiter à des littérateurs estimables. Et c’est ainsi qu’on a fait composer le Triomphe de Trajan par Esménard, et les tragédies d’Hector et de Tippo-Saïb par Luce de Lancival et Jouy. On allait même plus loin : on faisait mutiler les tragédies de Corneille par Esménard, ou pour en effacer quelques