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sans aucune étude préalable, remplissait les fonctions importantes de grand juge ministre de la justice. Tous ces jeunes gens n’avaient ni les lumières, ni la considération, ni les convenances nécessaires ; mais il les croyait dévoués à sa personne et à son gouvernement, et cela lui suffisait. Il avait porté les mêmes principes dans l’organisation de l’armée. La gloire de nos anciens généraux l’importunait, leurs conseils lui déplaisaient ; et, dans les dernières années, il cherchait bien moins à employer le talent qu’à payer le dévouement à sa personne.

Ce système de conduite dérivait partout du même principe : c’est que, s’étant isolé du reste des hommes, ayant concentré dans ses mains tous les pouvoirs et toute l’action, bien convaincu que les lumières et l’expérience d’autrui ne pouvaient lui être d’aucun secours, il pensait qu’il n’avait besoin que de bras, et que les plus sûrs étaient ceux d’une jeunesse dévouée.

Cette conduite de la part de Bonaparte n’a pas peu contribué à lui aliéner l’esprit des Français. Un département qui se voit placé