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appelée à un si bel avenir, ont bien pu donner quelque fondement à ce bruit. J’ai dit souvent que les symptômes d’agitation qu’éprouve l’Europe depuis de longues années, et l’inquiétude des esprits, annonçaient plutôt une décomposition qu’une régénération. Je pense fermement que le plus haut terme de la civilisation des peuples est le plus haut degré de dépravation, que l’un amène nécessairement l’autre, et que les nations ont leur état d’enfance, de force et de dégénération, tout comme les individus.

« La Grèce, l’Égypte, Rome ont parcouru leur cercle, l’Europe pourra bien les imiter. L’Amérique a encore deux à trois siècles de croissance. Le sol peut nourrir cent cinquante millions d’habitants, et il n’en a que neuf. Les travaux agricoles ne dénaturent point l’espèce ; mais les arts de luxe, les grandes réunions et les travaux sédentaires la détériorent[1]… »

N’est-ce pas encore une fois l’influence des montagnes paternelles, de l’air pur et libre des Cévennes, qui détermine cette prédilection particulière pour l’agriculture ? La lettre a dû être écrite à Chanteloup, où Chaptal est resté de 1815 à 1818, sans se rendre à Paris.

Il y avait deux hommes dans le propriétaire de

  1. Cette lettre a été publiée dans l’ouvrage de M. P. Triaire (Bretonneau et ses correspondants).