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qu’il a conquis et le parti qu’il peut tirer des circonstances où il se trouve. Il lui montre qu’en définitive le bien surpasse le mal, et qu’il doit se tenir pour très heureux de vivre à l’époque où il est parvenu. Il félicite l’agriculteur d’avoir conquis la plénitude du droit de propriété, l’industriel la liberté du travail ; à ce dernier, il fait l’histoire du régime industriel de la monarchie, dont il montre tous les inconvénients ; mais il met le patron aussi bien que l’ouvrier en garde contre les excès de la liberté mal comprise. Nul n’était plus autorisé à leur donner des conseils que l’homme qui a vécu pendant quarante ans dans les ateliers et au milieu des ouvriers. On retrouve constamment dans ses ouvrages l’esprit qui a présidé au développement de notre démocratie, dont il a prévu et encouragé toutes les espérances.

Cette âme si confiante dans les destinées réservées à notre pays avait eu cependant son heure de découragement. À propos de l’Amérique, il écrit le 11 décembre 1815 : « J’avais bien présumé, mon cher Bretonneau, que les bruits qu’on a fait courir de mon départ pour les États-Unis d’Amérique affecteraient mes amis, et c’est la seule peine que j’en aie éprouvé. Quoique mon intention n’ait jamais été d’abandonner un pays auquel je tiens par habitude et par affection, mes opinions sur l’état actuel de l’Europe et sur l’Amérique, qui est