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LA VIE ET L’ŒUVRE

plusieurs ouvrages de médecine et d’histoire naturelle qui existaient dans la maison et dans lesquels on lisait de préférence à tout autres. Je me suis souvent reporté moi-même par la pensée à ce premier âge, où, à peine instruit dans les éléments de la lecture, je prenais un plaisir tout particulier à feuilleter un Aristote qui m’était tombé sous la main. Cet ouvrage piquait particulièrement ma curiosité par de mauvaises gravures en bois qui reproduisaient les principaux animaux. Je me rappelle même qu’à l’insu de mes parents j’en détachai quelques gravures que je calquai assez grossièrement, et que j’avais ensuite la petite vanité de présenter comme des dessins d’après nature.

Mon éducation fut peu soignée jusqu’à l’âge de dix ans ; à cette époque, je fus placé chez un bénéficier de la cathédrale de Mende, appelé M. Caylar ; ce prêtre, qui ne savait guère qu’un peu de latin, m’initia d’abord dans les principes de cette langue et me mit dans le cas d’entrer au collège des Doctrinaires de cette ville, où je débutai par la cinquième. Mes progrès furent assez rapides, et, en peu de temps, je parvins à être un des premiers de ma classe. M. Caylar surveillait mes études, excitait mon émulation, me faisait parler latin dans la conversation et tirait vanité de quelque facilité que j’avais, avec une pédanterie qui, même à cette époque, me paraissait fort ridicule.