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Essai

mêloient du miel au moût qu’ils faisoient fermenter. Mais, de nos jours, on a fait des expériences très-directes à ce sujet, et je me bornerai à transcrire ici les résultats de celles qui ont été faites par Macquer.

« Au mois d’octobre 1776, je me suis procuré assez de raisins blancs, Pineau et Mélier, d’un jardin de Paris, pour faire vingt-cinq à trente pintes de vin. C’était du raisin de rebut ; je l’avois choisi exprès dans un si mauvais état de maturité, qu’on ne pouvoit espérer d’en faire un vin potable ; il y en avoit près de la moitié dont une partie des grains et des grappes entières étoient si vertes, qu’on n’en pouvoit supporter l’aigreur. Sans autre précaution que celle de faire séparer tout ce qu’il y avoit de pourri ; j’ai fait écraser le reste avec les rafles, et exprimer le jus à la main ; le moût qui en est sorti étoit très-trouble, d’une couleur verte, sale, d’une saveur aigre douce, où l’acide dominoit tellement qu’il faisoit faire la grimace à ceux qui en goûtoient. J’ai fait dissoudre dans ce moût assez de sucre brut pour lui donner la saveur d’un vin doux assez bon ; et, sans chaudière, sans entonnoir, sans fourneau, je l’ai mis dans un tonneau, dans une salle au fond d’un jardin, où il a été abandonné. La fermentation s’y est établie dans la troisième journée, et s’y est soutenue pendant huit jours, d’une