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limoilou

Au temps où l’astre d’or qu’on nomme Renaissance
Versait tout son éclat fastueux sur la France.
Depuis déjà longtemps il n’est plus habité,
Et les fermiers voisins disent qu’il est hanté.
Le haut mur qui l’enclôt se lézarde et se gerce ;
Son vitrage est en poudre, et le vent et l’averse
S’engouffrent à travers ses treillages jaunis
Où des essaims d’oiseaux nocturnes font leurs nids ;
L’ossature du toit s’affaisse et se disloque,
Chaque volet s’éraille et pend comme une loque,
Chaque plancher moisit et craque sous les pas ;
Partout où les rayons du soleil n’entrent pas
Librement l’araignée ourdit ses sombres toiles ;
Le soir, par le plafond, on compte les étoiles,
Et l’on voit clignoter aux soliveaux souillés
L’éclair des grands yeux ronds des hiboux éveillés.
Tout cet intérieur vous attriste et vous glace ;
Et bientôt Limoilou ne serait qu’une masse
De débris à l’aspect sinistre et menaçant,
Et dont n’oserait plus s’approcher le passant,
Si ses murs, aussi froids et mornes que les tombes,
N’eussent été bâtis à l’épreuve des bombes.