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peut le mieux constater l’étrange défaut observé chez de Banville, qui, lui, par exemple, paraît n’avoir voulu « tirer de la rime et du rythme que des effets comiques et réjouissants. »

Aussi, quand M. Fréchette publia Mes Loisirs, plusieurs journaux ne se firent pas faute de lui reprocher de n’y avoir exprimé guère d’idées, de n’avoir pas d’invention, de ne chercher que des « effets harmoniques et des sonorités particulières, » qu’à éblouir par la richesse de la rime, enfin de sonner creux.

À la fois humilié et vexé de ce reproche, M. Fréchette voulut se reprendre, prouver qu’il avait bien le mens divinior, qu’il pouvait… voler très haut, et, pour arriver à cela, il publia, après son départ de Québec pour Chicago, la Voix d’un Exilé, dans laquelle il mit une bonne moitié des Châtiments de Victor Hugo.

Les Châtiments, il va sans dire, lui valurent beaucoup d’éloges de la part d’une certaine école.

Malheureusement ces éloges tombèrent si dru et si lourdement sur le poète destiné à devenir un des hommes du jour, qu’il en perdit la tête, et finit par croire que c’était… arrivé, tout comme ce farceur qui avait couru voir si la baleine qu’il avait inventée n’ était pas, par hasard, réellement échouée sur le rivage.[1]

  1. M. Louis Taché venait de publier la biographie de M. Fréchette dans les Hommes du Jour.