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DE LA NOUVELLE-FRANCE

loyaux, et, par exception, celui d’aviseurs modestes ou d’auxiliaires dévoués, quand on avait sollicité leurs conseils ou leur concours[1]. Que signifiaient donc ces imputations diffamatoires ? C’était l’esprit du règne qui s’affirmait, dès le début, dans les affaires du Canada, comme il allait s’affirmer davantage encore dans les affaires de France et dans les relations du roi-soleil avec l’Église. Esprit détestable et pernicieux, mélange de foi et d’orgueil, de respect pour la religion et d’empiétement sur ses droits, de zèle orthodoxe et de prétentions dominatrices frisant l’hétérodoxie. C’était en un mot le gallicanisme d’État, toujours prêt à dénoncer les envahissements de l’Église, lorsqu’elle demande tout simplement à exercer sans entraves la mission qu’elle tient de Dieu. Le grief qui se dissimulait derrière la phraséologie vaguement malveillante du mémoire royal, avait pour seul prétexte la fermeté avec laquelle Mgr de Laval et les Jésuites exerçaient leur autorité spirituelle dans la répression des abus, et spécialement dans la lutte contre la traite de l’eau-de-vie. Voilà de quoi on leur en voulait surtout.

Nous avons tenu à signaler immédiatement cette fâcheuse disposition du roi, malheureusement encouragée par Colbert, qui était un gallican accompli, le type de l’homme d’État césarien, comme nous aurons occasion d’en fournir des preuves.

  1. — Nous ne prétendons pas que Mgr de Laval et les Jésuites ne se trompèrent jamais dans leurs appréciations, et ne commirent jamais de fautes dans leurs actes publics. Mais nous soutenons énergiquement que l’accusation de vouloir usurper l’autorité temporelle et politique n’était qu’une mauvaise querelle gallicane.