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DE LA NOUVELLE-FRANCE

un platon d’une assez vaste étendue qui tombe sur la rivière Saint-Charles avec vingt pieds de pente, qui conduit à un chenail (chenal) que j’ai fait sonder et qui s’est trouvé avoir 15 pieds d’eau de marée haute, qui se réduit à trois de basse mer. Cette rivière, qui contourne, fait des coudes fort sûrs et dans lesquels les vaisseaux peuvent être à couverts de tous vents, et, de l’endroit choisi pour l’atelier, n’a qu’une portée de canon jusqu’au chenail du fleuve Saint-Laurent. J’ai fait baliser et sonder ce chenail par six capitaines de vaisseaux qui étaient à la rade. Et ce que je dis (ce que je n’avance qu’avec peine pour ne rien faire espérer qui n’ait un succès entier) est l’avis et le sentiment de ces hommes de mer, que je rends dans la pureté. Ils n’ont pas hésité de dire que l’assiette la mieux choisie de France n’a pas ces avantages ; comme je ne suis pas homme de mer, je donne pour garant les avis que j’ai pris de ces hommes du métier[1]. » Quand on songe à l’immense extension que reçut plus tard la construction navale sur les bords de la rivière Saint-Charles, aux vastes chantiers qui s’y multiplièrent, à l’innombrable quantité de vaisseaux qui en sortirent, on se dit que l’intendant Talon avait le coup d’œil juste.

Le commerce maritime prenait d’heureux développements. Nous avons vu que les trois navires construits ici et expédiés aux Indes Occidentales à l’automne de 1670, avaient un chargement considérable et varié. Ils devaient débarquer leurs marchandises aux Antilles, et prendre une cargaison de sucre pour la France, d’où ils rapporteraient au Canada les choses nécessaires au

  1. Talon au roi, 10 novembre 1670 ; Addition au présent mémoire. Arch. féd., Canada, corr. gén., vol. III.