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JEAN TALON, INTENDANT

et on faciliterait les ouvertures du côté des régions méridionales, par le travers des terres. « Du bâtiment que je propose (de la dépense duquel je me charge), écrivait l’intendant, j’entrevois par la traite avec les sauvages, un très grand bénéfice, que je ne demande pas pour moi, mais le faisant que je prétends employer à soulager les dépenses que le roi est obligé de faire pour le soutien de cette colonie[1]. » Mais des projets de cette ampleur pouvaient-ils s’exécuter par-dessus la tête du gouverneur général ? Talon s’était fait à lui-même cette réflexion, et se hâtait d’ajouter : « Pour que je puisse faire réussir ce dessein il est besoin que j’aie un ordre à M. de Courcelle pour qu’il me donne du côté des troupes toute l’assistance dont j’aurai besoin, et un ordre général aux officiers d’agir en ces établissements conformément à ce que je leur dirai. » Nous avons ici un aperçu intéressant de l’attitude respective, ainsi que des relations mutuelles de Courcelle et de Talon. Celui-là se voyait souvent effacé par celui-ci. Le premier, plein d’intrépidité, d’énergie et d’intelligence, était cependant distancé par la promptitude, la rapide initiative, l’activité supérieure, la conception plus large et plus vive du second. Le gouverneur en souffrait, s’en irritait et le laissait voir.

La question iroquoise préoccupait fortement Talon, car il y revenait encore dans un autre passage du même document. La fierté des cinq cantons avait été humiliée, disait-il, mais non pas abattue, et s’ils ne faisaient pas présentement la guerre à la colonie c’était parce qu’ils avaient sur les bras les Andastes, peuple guerrier,

  1. Talon au roi, 10 novembre 1670. (Archives prov. ; Man. N. F., 1ère série, vol. I).