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JEAN TALON, INTENDANT

les vit guerroyer contre l’évêque et rédiger des mémoires où ils faisaient écho à toutes les déclamations des dénonciateurs du clergé relativement à « la gêne des consciences[1]. » Nous regrettons d’avoir à faire d’aussi sévères appréciations, mais la vérité historique nous y oblige. La lecture des documents et des correspondances de cette époque, des pièces mêmes rédigées par les Récollets et en leur faveur, nous force à déclarer que, de 1673 jusqu’à la fin du dix-septième siècle, ils donnèrent ici de trop nombreux exemples d’insubordination et d’opiniâtreté. Un esprit de critique, de discorde, de contention, sembla les posséder. Leur attitude fut peu satisfaisante dans la question de l’eau-de-vie ; ils donnèrent leur appui moral au gouverneur Frontenac dans ses luttes contre le pouvoir spirituel ; ils outragèrent l’autorité épiscopale dans la personne de Mgr de Laval et de Mgr de Saint-Vallier ; en un mot ils jouèrent souvent pendant ce quart de siècle un regrettable rôle[2]. Et leurs écrivains tels que le Père Chrétien Leclercq, le Père

  1. — Nous lisons dans un mémoire rédigé par les Récollets en 1681 : « Nous sommes envoyés en ce pays pour y soulager les consciences étrangement gênées par une conduite aussi extraordinaire que celle des autres » (c’est-à-dire les Jésuites et Mgr de Laval). Plus loin, le mémoire désigne ceux-ci comme « la cabale immortelle du pays » ; il affirme que les Récollets « confessent en secret », et n’exercent leur ministère « que comme dans une Hollande et dans une Angleterre. » (Le Tac, pp. 200, 202, 203).
  2. — Au sujet de la traite de l’eau-de-vie, M. Dudouyt écrivait à Mgr de Laval en 1681 : « Un des principaux et des mieux intentionnés (des Récollets) dit hier que le mal était qu’on ne convenait du principe, qui consiste en ce que M. l’évêque et les Jésuites défendent l’eau-de vie pour en traiter seuls. Ces bons pères sont si bien affermis dans cette impres-