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DE LA NOUVELLE-FRANCE

entachée de cet arbitraire administratif qui était l’un des traits caractéristiques de l’époque. Mais dans son ensemble l’arrêt dénotait le plus louable zèle pour l’augmentation des familles et l’accroissement de la population. Colbert ne faisait qu’appliquer au Canada, en 1669, ce qu’il avait décrété pour la France, en 1666. Par un arrêt du mois de novembre de cette année, le roi déclarait qu’à l’exemple des Romains, imité par la province de Bourgogne dans ses usages particuliers, il avait résolu d’accorder des privilèges à la fécondité des mariages. Il exemptait donc de toutes contributions aux charges publiques, jusqu’à l’âge de vingt-cinq ans, ceux de ses sujets qui se marieraient avant d’avoir vingt ans. Tout père ayant dix enfants vivants, nés en loyal mariage, sans qu’aucun soit prêtre ou religieux, serait exempt de toute contribution aux charges publiques, soit d’état, soit de ville et communauté. L’enfant mort sous les drapeaux compterait comme vivant. Tout père ayant douze enfants vivants ou morts serait également exempt. Tous sujets taillables, non mariés à vingt et un ans, seraient, au contraire, imposés en proportion de leurs biens, moyens et commerce. Les gentilshommes et leurs femmes, ayant dix enfants vivants, ou morts au service, non prêtres, ni religieux, auraient 100 livres de pension ; ceux qui en auraient douze auraient 200 livres.

    plus catégorique, c’est ce passage d’une lettre de Colbert à M. de Frontenac, du 21 janvier 1672 : « Le roi ayant accordé plusieurs grâces, par l’arrêt de son conseil du 3 avril 1669, en considération de la fécondité des familles et des garçons qui se marieraient à vingt et les filles à quinze, Sa Majesté ne doute pas que le sieur de Frontenac ne se serve avantageusement de ces moyens », etc. (Lettres, Instructions, etc., 3, II, p. 536).