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JEAN TALON, INTENDANT

1668 en indiquait 15,649 ; et la production du blé s’élevait à 130,978 minots[1]. C’était un beau résultat.

Nous avons vu que Talon avait commencé à encourager la culture du chanvre. Jusque là on n’avait guère cultivé cette plante, pour la raison donnée par M. Boucher en 1663 : « Pourquoi ne fait-on pas quantité de chanvre puisqu’il vient si bien ! La même raison que j’ai apporté pour la vigne, je l’apporte pour le chanvre, savoir que nous n’avons songé qu’au blé jusqu’à maintenant comme le plus nécessaire. J’ajoute seulement que nous sommes trop peu de monde : car après la défaite de l’Iroquois, il ne manquera que des habitants pour y avoir tout ce que l’on y peut souhaiter. » Stimulés par la tactique ingénieuse exposée par Talon

  1. Supplément aux Archives, Richard, 1899, p. 238. — En 1668 il n’y eut pas de recensement détaillé. Mais l’intendant envoya au ministre un relevé général de la population, des terres en culture, du bétail, de la récolte du blé. Cette récolte avait été fort abondante, au témoignage de la Mère de l’Incarnation. Il était paru à l’horizon de Québec au mois d’avril de cette année une comète « en forme de lance, rougeâtre et enflammée, et si longue que l’on n’en pouvait voir le haut. Elle suivait le soleil après son couchant, et ne parut que peu de temps, perdant sa lueur à cause de celle de la lune. » La révérende Mère, à qui nous empruntons la description de cet astre errant, écrivait à son fils : « Quoi qu’il en soit, cette comète n’a causé aucune malignité sur les blés, dont la moisson a été abondante, en sorte qu’il y a sujet d’espérer que l’on trouvera de quoi nourrir tout le monde. » (Lettres de la vénérable Mère Marie de l’Incarnation, II, p. 397).

    À cette époque on croyait encore assez couramment à l’influence pernicieuse des comètes. « Depuis l’antiquité la plus reculée, a écrit M. Babinet, jusqu’aux travaux de Newton en 1680, les comètes ont été considérées comme des présages de malheurs publics. »