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DE LA NOUVELLE-FRANCE

1667 on modifia encore le tarif des prix de vente ; on le mit à 70 pour cent du chiffre des factures, pour les marchandises sèches, et pour les liquides à 100 pour cent, lorsque le prix coûtant était de plus de 100 francs le tonneau, et de 120 pour cent, lorsqu’il était au-dessous de 100 francs, le droit de 10 pour cent compris[1].

Les marchands ne s’étaient pas soumis sans murmurer à ces règlementations autoritaires de leur négoce. Poursuivi pour contravention, avec plusieurs autres, au mois de novembre 1664, le plus considérable d’entre eux, M. Charles Aubert de la Chesnaye, avait prononcé cette parole significative touchant la liberté du commerce : « J’ai toujours cru avoir la libre disposition de mon bien, vu surtout que j’emploie dans le pays ce que j’y gagne. » Les condamnations pour violations de tarif furent fréquentes. Au mois de juin 1667, durant une séance du Conseil à laquelle assistaient MM. de Tracy, de Courcelle et Talon, ainsi que Mgr de Laval, le procureur général Bourdon introduisit une instance contre Jacques de la Mothe, marchand, accusé d’avoir vendu son vin et son tabac à des prix plus élevés que ceux des règlements faits l’année précédente. Le sieur de la Mothe reconnut qu’il avait vendu son vin cent livres la barrique et son tabac soixante sous la livre ; mais il ajouta que son vin était du crû de Bordeaux, que la barrique en contenait cent vingt pots, que « la garde qu’il en avait faite, le coulage et le risque, méritaient bien d’y avoir égard, » de plus qu’il en avait deux barriques de gâtées, et « que l’autre devait récompenser par le prix ; » quant à son tabac, disait-il, c’était du Maragnan, et il avait toujours déclaré ne pouvoir le vendre à moins d’un écu (soixante

  1. — Ibid., p. 537.