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JEAN TALON, INTENDANT

enquête sur les bals donnés par les particuliers, et sur le bien fondé des prescriptions et des conseils de l’autorité religieuse au sujet des divertissements mondains ? Talon, on le verra ultérieurement, était fort enclin à accuser les ecclésiastiques de vouloir empiéter sur l’autorité civile. Il ne s’apercevait pas que l’usurpation de juridiction était plutôt sa tendance, à lui. Tendance qui lui venait de l’atmosphère gallicane qu’il avait respirée en France. C’était bien là l’esprit de notre ancien régime : ingérence constante et tracassière du pouvoir politique dans les affaires internes, dans la discipline, parfois même dans l’enseignement de l’Église ; et cela tout en dénonçant sans relâche l’esprit envahisseur de cette dernière. L’école césarienne tenait pour incontestable que l’État avait le droit de contrôler l’exercice du pouvoir spirituel. Prétention détestable, féconde en misères et en conflits ! Le malheur de Louis XIV et de ses ministres, — comme celui de beaucoup d’autres gouvernements, — fut de ne pas comprendre que l’idéal des relations entre l’Église et l’État, c’est leur union harmonieuse basée sur leur indépendance parfaite dans leur sphère respective.

On conçoit la rumeur que « l’affaire de la Sainte-Famille » dut causer dans la petite ville de Québec. Ce fut sans aucun doute la sensation du moment, le sujet favori des conversations mondaines, le thème de nombreuses discussions et d’innombrables gloses. Que de docteurs et de doctoresses improvisés durent se donner carrière ! Cependant l’épisode se termina ex abrupto. L’influence pacificatrice de M. de Tracy se fit probablement sentir. Et un beau jour, au-dessous de la requête de Talon, en date du 14 mars 1667, dans le registre