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JEAN TALON, INTENDANT

puissance militaire de la colonie française. Le fruit de cette campagne fut dix-huit ans de paix pour le Canada. Dix-huit ans de paix après vingt ans de carnage ! Nos ancêtres avaient bien raison de chanter le Te Deum,

Peu après son retour, M. de Tracy fit pendre l’un des chefs agniers détenus à Québec, le principal instigateur de la trahison de ses compatriotes[1]. Cet exemple fit trembler les autres. Il chargea ensuite le Bâtard Flamand et un ancien d’Agnier, ainsi que deux chefs onneyouts, d’aller informer leurs cantons respectifs qu’il leur donnait quatre lunes pour envoyer des otages et conclure une paix loyale, et qu’à défaut de ce faire il retournerait dans leur pays à la tête de ses troupes, mais que cette fois, ils n’en seraient plus quittes à si bon marché.

  1. Lettres de la Mère de l’Incarnation, II, p. 335. — Nous croyons devoir reproduire ici une note de M. l’abbé Ferland, Cours d’Histoire du Canada, II, p. 58 : « Ni la M. de l’Incarnation, ni les Relations des Jésuites ne parlent de ce fait. Nous suivons ici le Journal des Jésuites, dans lequel les événements étaient inscrits, jour par jour, à mesure qu’ils avaient lieu. Nicolas Perrot, qui écrivait plusieurs années après 1666, et qui ne saurait être par conséquent aussi exact, place ce fait avant l’expédition et le rapporte différemment. Suivant lui, cet agnier aurait, dans un repas que M. de Tracy donnait aux chefs iroquois, levé le bras et déclaré hautement que ce bras avait cassé la tête du Sieur de Chazy. « Il n’en cassera pas d’autre », aurait répondu le vieux général, et il aurait aussitôt fait étrangler l’insolent, rompu les conférences qui se tenaient pour la paix, et serait parti pour son expédition contre les Agniers. Charlevoix a suivi Perrot dans ce récit. » Contrairement à ce que dit ici M. Ferland par inadvertance, ce n’est pas le Journal des Jésuites mais bien la M. de l’Incarnation qui parle de la pendaison du chef agnier, après le retour de M. de Tracy. La Potherie, dans son Histoire de l’Amérique Septentrionale donne la même version que Perrot et ajoute que ce chef s’appelait Agariata.