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JEAN TALON, INTENDANT

Tout fut consumé, les palissades, les bastions, les cabanes, les vivres, sauf ce dont l’armée avait besoin, les grains et les moissons sur pied. La torche incendiaire n’épargna rien, et le soir de ce jour le canton d’Agnier n’était qu’un monceau de ruines fumantes.

M. de Tracy aurait bien voulu infliger le même sort au canton d’Onneyout. Mais la saison était trop avancée : il donna le signal du départ. Le retour fut très pénible ; on éprouva de grandes difficultés à traverser les rivières grossies par les pluies d’automne. Sur le lac Champlain une tempête fit chavirer deux canots, et huit hommes se noyèrent.

Le 5 novembre, M. de Tracy arrivait à Québec, après une campagne de sept semaines durant lesquelles il avait fait plus de trois cents lieues et encouru de grands périls. On n’avait appris que trois jours auparavant la nouvelle de son succès. La joie de la population fut extrême. Depuis le 1er octobre toute la colonie était en prières. L’oraison des quarante-heures se disait tous les jours. Dans les communautés, dans les églises, dans les familles, les supplications les plus ferventes étaient adressées au ciel pour le triomphe de nos armes. Aussitôt que l’heureuse issue de l’expédition fut connue, les prières se changèrent en actions de grâces. Le Te Deum fut chanté eu grande pompe, et, le 14 novembre, dans Notre-Dame de Québec, on célébra une messe solennelle suivie d’une procession in gratiarum actionem.[1]

  1. — Pour cette expédition de M. de Tracy, les autorités à consulter sont principalement les Lettres de la Mère de l’Incarnation, les Relations des Jésuites, le Journal des Jésuites, l’Histoire du Montréal, par Dollier de Casson (Montréal, 1869), l’Acte de prise de possession, (Arch. prov., Man. N. F., 1ère série, vol. I).