Page:Chapais - Jean Talon, intendant de la Nouvelle-France (1665-1672), 1904.djvu/145

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
127
DE LA NOUVELLE-FRANCE

serie, dont quelques-unes avaient cent vingt pieds de long sur une largeur proportionnelle, et pouvaient loger huit ou neuf familles. Toutes ces habitations étaient « remplies de vivres, d’ustensiles, de toutes sortes de commodités et de meubles, rien ne leur manquait ; elles étaient bien bâties et magnifiquement ornées, garnies d’outils de menuiserie et d’autres dont les Iroquois se servaient pour la décoration de leurs cabanes et de leurs meubles[1]. » Le voisinage et les leçons des Hollandais de Corlaer et d’Orange avaient laissé là leurs traces manifestes. Il y avait dans cette bourgade et dans les quatre autres d’immenses quantités de provisions et de grains, « de quoi nourrir tout le Canada deux années entières. » Et les champs cultivés qui s’étendaient aux alentours étaient couverts d’une moisson luxuriante. Tout cela allait être voué à la destruction. Mais auparavant il restait à accomplir une cérémonie solennelle. L’armée fut rangée en bataille en face d’Andaraqué, et le sieur Jean-Baptiste Dubois, commandant de l’artillerie, s’avançant sur le front des troupes, en présence de MM. de Tracy et de Courcelle, déclara que, député par Jean Talon, conseiller du roi en ses conseils d’État et privé, intendant général de justice, police et finance dans la Nouvelle-France, et à la requête du dit sieur Talon, il prenait possession au nom du roi du dit fort et de toutes les terres avoisinantes, ainsi que des quatre autres bourgs conquis sur les Iroquois. Une croix fut plantée devant les portes du fort et un poteau érigé avec les armes du roi. On célébra ensuite la messe et l’on chanta le Te Deum. Puis Andaraqué et les autres villages furent livrés aux flammes.

  1. Lettres de la Mère de l’Incarnation, II, 330, 335.