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JEAN TALON, INTENDANT

demeurerait un grand nombre au Canada, si le roi rappelait le régiment de Carignan après la guerre. Puis il parlait de la construction des vaisseaux. « Je juge, disait-il, qu’on pourra quelque jour bâtir ici des vaisseaux propres à la navigation lors particulièrement que nous serons plus avancés vers le sud, où les arbres sont d’une plus belle venue, et où les chênes sont moins rares qu’ici, et d’autant plus que le fondeur dont j’ai parlé m’assure qu’il fera couler le sable de fer qui se trouve ici assez abondamment à ce que l’on m’a dit. En voici un petit sac pour en faire l’épreuve à laquelle ce même fondeur pourra bien travailler si vous lui ordonnez ; il l’aurait fait ici s’il y avait trouvé les instruments nécessaires à cet usage. D’ailleurs pour les agrès vous connaîtrez que, par la dernière réponse donnée à l’instruction, on peut attendre de ces terres du moins autant de chanvre qu’on en tire de celles de France, puisqu’elles n’ont pas moins de disposition de le produire ; et si je trouve quelque facilité à faire du brai et de la résine, ce que je n’ose encore espérer, vous trouveriez en ce pays tout ce qu’il faut pour un vaisseau, sans tirer du dehors de secours pour aucune de ses parties. » Nos lecteurs verront ultérieurement que cette idée ne resta pas chez Talon à l’état de velléité, mais qu’il fut vraiment le pionnier de la construction des navires en ce pays.

L’intendant faisait ensuite de M. de Tracy ce magnifique éloge ; « Je reconnais si peu de santé en M. de Tracy, que je crains avec raison que nous le perdions, soit par la mort, soit par la retraite qu’il médite dans l’espérance que le roi lui donnera son congé, si Sa Majesté a égard à son âge et aux incommodités qu’une