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celui de Clément d’Alexandrie, consiste en ce que ce dernier fait mention de l’écriture hiératique, dont les autres ne parlent pas. Mais la cause en est facile à découvrir : c’est qu’ils ont dû la comprendre parmi les caractères sacrés, et que Clément d’Alexandrie a dû au contraire la distinguer des caractères hiéroglyphiques ; voici pourquoi.

Tout le monde convient que l’épistolographique de Clément d’Alexandrie est la même chose que le démotique d’Hérodote et de Diodore, et que le national de l’inscription de Rosette.

Quant à l’hiératique, il est certain que c’était une espèce de caractères sacrés, puisque, selon Clément d’Alexandrie, c’était celle dont les hiérogrammates (ou greffiers sacrés) se servaient. Cette donnée importante est confirmée entièrement par vos recherches sur les papyrus égyptiens ; vous avez reconnu parfaitement ceux qui sont écrits dans ces caractères sacrés hiératiques, lesquels ne sont autre chose que des hiéroglyphes cursifs, ou abrégés, espèce de tachygraphie hiéroglyphique. Vous l’avez appelée avec raison écriture sacerdotale, comme étant employée par les prêtres dans les manuscrits, tandis que l’écriture hiéroglyphique était proprement l’écriture monumentale, ainsi que l’exprime le mot ἱερογλυφικά, littéralement, caractères sacrés sculptés. On pourrait donc appeler l’autre, écriture hiérographique, ou écriture sacrée écrite. Cette distinction explique et concilie tout ; car remarquez bien qu’Hérodote et Diodore ne se servent pas du mot ἱερογλυφικά, ils emploient l’expression ἱερά, sacrés ; or, cette expression contient nécessairement tous les genres d’écriture sacrée et l’hiératique comme les autres ; au contraire. Clément d’Alexandrie parle de l’hiéroglyphique (ἱερογλυφική), expression moins générique, et qui ne doit pas comprendre l’hiératique, genre d’écriture qui n’était pas employé sur des monumens sculptés (γεγλυμμένα). Clément d’Alexandrie diffère donc des autres seulement en ceci, qu’ils n’ont employé que des expressions génériques, tandis qu’il est entré dans le détail des espèces ; et, jusqu’ici, on voit qu’il s’est exprimé avec une propriété bien remarquable. Par la même raison on conçoit pourquoi, dans le monument de Rosette, les caractères sacrés sont désignés par l’expression de ἱερά et non ιερογλυφικά, qui semblerait avoir été l’expression propre pour désigner le genre de caractères qui ont été gravés sur cette pierre. La distinction ici était inutile : car, comme l’hiératique ne servait point pour les monumens sculptés, il était clair que, puisqu’il s’agissait de graver des caractères sacrés sur la stèle, ces caractères sacrés ne pouvaient être qu’hiéroglyphiques ; et conséquemment l’expression générique ἱερά était, en ce cas, tout aussi précise qu’aurait pu l’être l’expression spécifique ἱερογλυφικά.