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LE DISQUE AILÉ ET L’ÉPERVIER,

EMBLÊMES DE THOTH TRISMÉGISTE, OU LE 1er HERMÈS.
Planche 15 (B) et 15 (C)

Il existe dans le dialogue que Cicéron a écrit sur la Nature des dieux, un passage fort remarquable relatif aux personnages divins appelés Thoth par les Égyptiens, Hermès par les Grecs, et Mercure par les Latins ; passage qui donne une grande idée de l’importance que le premier Hermès paraît avoir eue dans les mythes sacrés de l’Égypte. L’orateur romain a connu et confirme d’abord une distinction que j’ai cherché à établir, celle de deux Mercure ou Hermès chez les Égyptiens. Il affirme que ce peuple avait deux Mercure bien différents l’un de l’autre. Le premier était fils du Nil (c’est-à-dire, né du Démiurge Ammon-Cnouphis[1]) ; et les Égyptiens, ajoute-t-il, regardaient comme un crime de prononcer son nom, « (Mercurius) Nilo natus quem Ægyptii nefas habent nominare »[2]. Quant au second Mercure connu en Égypte, poursuit Cicéron, c’est celui qui a tué Argus et qui, à cause de cela, s’étant réfugié en Égypte, donna des lois et les lettres à ce pays. Les Égyptiens l’appellent Thoyth, du même nom que le premier mois de leur année[3]. Il est évident, d’après ce passage, que ne porta point le nom de Thoyth (le Thôout des livres coptes), appellation propre au second Hermès : était-ce celui de Θὼθ, par lequel Manéthon le désigne directement ? C’est ce que nous ignorons encore : mais, ce qui ne saurait être douteux, le premier Hermès, dont, suivant Cicéron, il était défendu aux Égyptiens de prononcer le nom, est bien certainement le même que le dieu nommé par Iamblique, d’après les livres sacrés de l’Égypte, ΕΙΚΤΟΝ, le premier des dieux célestes (Οὐράνιοι θεοὶ), intelligence supérieure émanée de l’intelligence première, Knèph, le grand Démiurge ; Eicton, dont la divine essence ne pouvait être dignement adorée que par le silence seul, Ὁ δὴ καὶ διὰ σιγῆς μόνης θεραπεύεται[4].

  1. Voyez l’explication de notre planche 3 ter.
  2. Cicero, De natura Deorum, lib. III, § XXII.
  3. (Mercurius) quem colunt Pheneatæ, qui et Argum dicitur interemisse ob eamque causam Ægyptum profugisse atque Ægyptiis leges et litteras tradidisse. Hunc Ægyptii Thoyth appellant ; eodemque nomine anni primus mensis apud eos vocatur. (Cic., loc. cit.)
  4. Iamblique, de Mysteriis, sec. VIII, cap. III.