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NÉITH CASTIGATRICE.

 
Planche 6 septies

L’image de la déesse que présente la planche 6 sexies, a été calquée sur le second cercueil d’une magnifique momie existant dans le Musée royal égyptien de Turin. Le naos qui renferme cette figure symbolique est entouré d’uræus dont le ventre est censé orné de plaques d’émaux bleus, rouges et verts, comme l’est réellement un très-bel uræus en bois doré et qui appartient au Musée Charles X au Louvre. La tête de lion et toutes les parties nues du corps de la déesse, sont de couleur verte. Dans l’une de ses mains est le signe de la vie divine, dans l’autre, le sceptre terminé par un calice de lotus uni à deux fleurs de lotus, emblèmes du monde matériel. La tête du crocodile symbole des eaux, est combinée avec la tête de lion qui caractérise spécialement cette grande divinité, en exprimant sa principale attribution, celle de gardienne vigilante.

Horapollon nous apprend, en effet, que, dans l’écriture symbolique des Égyptiens, la tête du lion (λέοντος κεφαλὴ) exprimait le vigilant (ἐγρηγορότα) et le gardien (φύλακα), et c’était pour cela, ajoute-t-il, qu’on plaçait des représentations du lion comme gardiens (ὡς φύλακας), aux portes des temples[1]. Ce texte important explique à la fois et les lions assis que l’on a trouvé placés devant le premier pylone du grand temple de Philæ[2], et les avenues ou rangées de statues de la déesse Léontocéphale érigées sur les dromos ou aux portes de divers temples de Thèbes[3]. Ainsi, la planche précédente (6 sexies) nous présenterait la grande divinité gardienne des eaux. Mais la tête du lion pouvait encore être prise sous d’autres acceptions dans l’écriture symbolique égyptienne ; cet animal, doué d’une force remarquable, inspire naturellement la crainte aux êtres vivants qui l’approchent, c’est pour cela que sa tête fut aussi l’emblême de la terreur et de tout ce qui est formidable, φοβερὸν[4] ; et cet emblême s’appliquait convenablement encore à la déesse léontocéphale, à laquelle on donnait pour principale fonction la garde et la conservation de la terre d’Égypte et des choses saintes qu’elle renfermait. Cet être mythique était censé éloigner, par la terreur, les profanes des lieux sacrés et leur infliger de justes châtiments. C’est sous une telle attribution que

  1. Horapollon, livre 1er, Hiéroglyphe 19.
  2. Description de l’Égypte, A., vol. I, pl. 9, nos 6 et 7.
  3. Voyez l’explication de notre planche 6 sexies.
  4. Horapollon, liv. 1er, Hiéroglyphe 20.