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THOTH DEUX FOIS GRAND,

PRÉSIDANT À LA RÉGION INFÉRIEURE.
Planche 30 (B)

Il en était du Thoth des Égyptiens, comme de l’Hermès des Grecs : ce fut l’être mythique auquel on attribua les fonctions les plus nombreuses et souvent même les plus opposées. Nous avons vu, en effet, le Thoth céleste, le seul des dieux émanés du Démiurge, et qui porte le surnom de trois fois grand, associé d’abord à l’œuvre de la création de l’univers et renfermant en lui-même toute la science des choses divines. Ce prototype de toute intelligence s’incarne ensuite pour civiliser l’espèce humaine, et se lie ainsi à un corps matériel. Lorsque les habitants de la Terre, éclairés par ses leçons, connaissent et pratiquent la vertu, et sont soumis à une organisation sociale régulière, imitation imparfaite de l’ordre qui règne dans les régions célestes, Thoth se retire dans la Lune pour se consacrer à l’accomplissement de nouveaux devoirs. Le génie qui présidait à cet astre, le dieu Pooh (ou Lunus), était considéré par les anciens Égyptiens comme le directeur perpétuel, comme le roi des ames qui, ayant quitté des corps matériels, erraient ballottées par les vents dans le vague des airs, jusqu’à ce qu’elles fussent appelées à animer de nouveaux corps, pour subir de nouvelles épreuves, expier leurs fautes passées, et sortir de la zône de l’air terrestre et agité, pour passer dans la troisième zône de l’Univers où régnait un air pur et léger. C’était dans ces deux zônes, ou divisions du monde, partagées en vingt-quatre régions ou contrées (χώρας) situées entre la Terre et la Lune, que le dieu Lunus exerçait directement son influence : il avait pour conseiller le dieu Thoth, qui présidait plus spécialement à la seconde zône ou division du monde, celle de l’air agité, qui se divisait en huit régions immédiatement situées au-dessus des quatre régions de la terre[1]. Cette zône de Thoth dépendait de l’empire lunaire, qui comprenait aussi une zône supérieure, celle de l’air pur, subdivisée en seize autres régions. Il est donc de toute évidence que le titre seigneur des huit régions, qui accompagne constamment les images de Thoth ibiocéphale dans les bas-reliefs et dans les peintures égyptiennes[2], se rapporte à

  1. Liber sacer ou Dialogue d’Isis et d’Horus ; Ioh. Stobæi, Eclog., lib. I, cap. 52, pag. 1077 et seq.
  2. Voyez planches 30, lég. no 1 ; et 305, lég. no 1. – Caylus, tome VI, pl. a, nos 2 et 3. – Grand mss. hiérogl., Description de l’Égypte, pl. 72 ; Scène du Jugement, lég. du dieu ; et toutes les légendes de Thoth ibiocephale sur les cercueils de momies.