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N’ayant point supposé, d’une part, que les Égyptiens avaient pu écrire les mots de leur langue en supprimant en grande partie les voyelles médiales, comme cela s’est pratiqué de tout temps chez les Hébreux et les Arabes ; et, d’un autre côté, ne soupçonnant point que beaucoup de signes employés dans ce texte pouvaient appartenir à la classe des caractères symboliques, le savant suédois, rebuté par de vaines tentatives, cessa de s’occuper du monument de Rosette. Il resta prouvé toutefois, par les travaux de MM. de Sacy et Ackerbald, que l’écriture vulgaire des anciens Égyptiens exprimait les noms propres étrangers par le moyen de signes véritablement alphabétiques.

Quant au texte hiéroglyphique de la stèle de Rosette, quoiqu’il fût bien naturel de l’étudier d’abord, puisqu’il se compose de signes-images ou de caractères figurés, de formes très-distinctes, et de le comparer avec le texte grec pour obtenir quelques notions exactes sur l’essence des signes sacrés qui forment le plus grand nombre des inscriptions égyptiennes connues, il ne fut soumis que fort tard à des recherches consciencieuses et jugées telles par la saine critique. On fut probablement détourné de s’en occuper par le mauvais état de cette première portion du monument, des fractures ayant fait disparaître une grande partie du texte hiéroglyphique. Son intégrité eût épargné, en effet, aux investigateurs, de longs tâtonnements et d’innombrables incertitudes.

Cette lacune fut loin d’être soupçonnée par un anonyme qui, en 1804, publia à Dresde une prétendue Analyse de l’inscription hiéroglyphique du monument trouvé à Rosette. L’auteur de cet ouvrage, renouvelant le mystique symbolisme du P. Kircher, crut reconnaître dans les quatorze lignes encore existantes de l’inscription hiéroglyphique (formant à peine la moitié de l’inscription primitive), l’expression entière et suivie des idées exprimées dans les cinquante-quatre lignes du texte grec. Ce travail ne peut soutenir le plus léger examen ; il vient néanmoins d’être réimprimé par son auteur, à Florence, comme une sorte de protestation formelle contre la direction nouvellement donnée aux études sur les hiéroglyphes.

Les auteurs des nombreux mémoires formant le texte de la Description de l’Égypte ne s’occupèrent des divers genres d’écritures égyptiennes que sous des rapports purement matériels : ils publièrent des copies d’un grand nombre d’inscriptions monumentales hiéroglyphiques, aussi fidèlement que pouvaient alors le permettre et la nouveauté de la matière, et les dangers sans cesse renaissants autour des courageux explorateurs qui les avaient recueillies. Ils reconnurent sur les monuments originaux l’exi-