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chacun une idée distincte, la connaissance de la langue égyptienne parlée devenait indispensable, puisque les caractères emblèmes ou symboles, employés dans l’écriture à la place des mots de la langue, devaient être disposés dans le même ordre logique et suivre les mêmes règles de construction que les mots dont ils tenaient la place ; car il s’agissait de rappeler à l’esprit, en frappant les yeux par la peinture, les mêmes combinaisons d’idées qu’on réveillait en lui en s’adressant aux organes du sens de l’ouïe par la parole.

Si, au contraire, et en opposition à la croyance si générale à cette époque, le système hiéroglyphique employait exclusivement des caractères de son, ces signes ou lettres composant l’écriture égyptienne, sculptés avec tant de profusion sur les monuments publics, ne devaient reproduire d’habitude que le son des mots propres à la langue parlée des Égyptiens.

En supposant enfin que l’écriture hiéroglyphique procédât par le mélange simultané de signes d’idées et de signes de sons, la connaissance de la langue égyptienne antique restait encore l’élément nécessaire de toute recherche raisonnée ayant pour but l’interprétation des textes égyptiens.

On ne songea même pas à user de cet instrument d’exploration d’un effet si certain ; et cependant il n’était point douteux, même dès les premières années du xviie siècle, que les manuscrits coptes rapportés d’Égypte par les missionnaires ou par les voyageurs, ne fussent conçus en langue égyptienne écrite avec des caractères très-lisibles, puisque l’alphabet copte, c’est-à-dire l’alphabet adopté par les Égyptiens devenus chrétiens, n’est que l’alphabet grec accru de quelques signes.

Par une singularité bien digne de remarque, ce fut le P. Kircher lui-même qui donna, en 1643, sous le titre de Lingua ægyptiaca restituta, le texte et la traduction de manuscrits arabes recueillis en Orient par Pietro della Valle, et contenant des grammaires de la langue copte ; plus, un vocabulaire copte-arabe. Dans cet ouvrage, qui, malgré ses innombrables imperfections, a beaucoup contribué à répandre l’étude de la langue copte, Kircher ne put se défaire de son charlatanisme habituel : incapable de tirer aucune sorte de profit réel, pour ses travaux relatifs aux hiéroglyphes, du recueil étendu de mots égyptiens qu’il venait de publier, il osa introduire dans ce lexique, et donner comme coptes, plusieurs mots dont il avait besoin pour appuyer ses explications imaginaires.

Ainsi, la connaissance du copte fut d’abord propagée en Europe dans