Page:Champlain - Oeuvres de Champlain publiées sous le patronage de l'Université Laval, Tome 2, 1870.djvu/61

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de laditte iſle iuſqu’à l’Iſte Percée, il y a quelque ſoixante ou ſeptante lieuës. Puis continuant laditte coſte, qui va deuers l’Eſt, on rencontre vn deſtroict qui peut tenir deux lieuës de large & vingt-cinq de long[1]. Du coſté de l’Eſt eſt vne iſle qui s’appelle Sainct Laurens[2], où eſt le Cap-Breton, & où vne nation de ſauuages appelez les Souricois hyuernent. Paſſant le deſtroit de l’iſte de Sainct Laurens, coſtoyant la coſte d’Arcadie[3], on vient dedans vne baye[4] qui vient ioindre laditte mine de cuiure. Allant plus outre, on trouue vne riuiere[5] qui va quelques ſoixante ou quatre vingts lieuës dedans les terres, laquelle va proche du lac des Irocois, par où leſdicts ſauuages de la coſte d’Arcadie leur vont faire la guerre. Ce ſerait vn grand bien, qui pourroit trouuer à la coſte de la Floride quelque paſſage qui allaſt donner proche du ſuſdict grand lac, où l’eau eſt ſalée, tant pour la nauigation des vaiſſeaux, leſquels ne ſeroient ſubiects à tant de périls, comme ils ſont en Canada, que pour l’accourciſſement du chemin de plus de trois

  1. Par le contexte, on voit que l’auteur parle du détroit de Canseau, qui n’a cependant ni autant de longueur, ni autant de largeur.
  2. Le nom de Cap-Breton a prévalu.
  3. Acadie. Il est possible que Champlain ait cru retrouver, dans ce mot, un nom de la vieille Europe ; mais il ne tarda pas à revenir de cette idée, si toutefois ce n’est point ici une simple faute de typographie. La commission de M. de Monts, qui est du 8 novembre de cette année 1603, renferme, entre autres, le passage suivant : « Nous étans dés long temps a, informez de la ſituation & condition des païs & territoire de la Cadie… » On lit, dans Jean de Laet, en tête d’un chapitre de sa Description des Indes Occidentales : « Contrées de la Nouvelle-France qui regardent le Sud, lesquelles les François appellent Cadie ou Acadie. » Si nous tenons ce nom des premiers voyageurs français, il est très-probable qu’ils le tenaient eux-mêmes des sauvages du pays : car ce mot se retrouve dans plusieurs noms de l’endroit ou des environs, comme Tracadie, Choubenacadie, qui sont certainement d’origine sauvage.
  4. La baie Française, aujourd’hui la baie de Fundy.
  5. La rivière Saint-Jean, que les sauvages appelaient Ouigoudi. (Voir édit. 1613, ch. III).