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les chreſtiens, qui croyent au Pere, au Fils & au Saint Eſprit, qui ne font pourtant trois dieux, ains vn meſme & vn ſeul dieu, & vne trinité en laquelle il n’y a point de plus toſt ou d’après, rien de plus grand ne de plus petit ; que la Vierge Marie, mere du fils de Dieu, & tous les hommes & femmes qui ont veſcu en ce monde faiſans les commandemens de Dieu, & enduré martyre pour ſon nom, & qui par la permiſſion de Dieu ont faict des miracles & ſont ſaincts au ciel en ſon paradis, prient tous pour nous ceſte grande maieſté diuine de nous pardonner nos fautes & nos pechez que nous faiſons contre ſa loy & ſes commandemens. Et ainſi, par les prieres des ſaincts au ciel & par nos prieres que nous faiſons à ſa diuine maieſté, il nous donne ce que nous auons beſoing, & le Diable n’a nulle puiſſance ſur nous, & ne peut faire de mal ; que s’ils auoient ceſte croyance, qu’ils feroient comme nous, que le Diable ne leur pourroit plus faire de mal & ne manqueroient de ce qu’ils auroient beſoing.

Alors ledict Sagamo me dict qu’il aduoüoit ce que ie diſois. Ie luy demandis de quelle cérémonie ils vſoient à prier leur Dieu. Il me dict, qu’ils n’vfoient point autrement de ceremonies, ſinon qu’vn chaſcun prioit en ſon cœur comme il voulloit. Voilà pourquoy ie croy qu’il n’y a au-

    « theologie ſe puiſſe expliquer à ces peuples, quand méme on ſçauroit parfaitement leur langue. » Il nous semble cependant que cette théologie n’a rien qui soit beaucoup plus difficile à entendre que la fable rapportée par le sagamo, puisque Champlain ne fait guère que lui raconter des faits historiques qui ont au moins en leur faveur le mérite de la vraisemblance. Supposé, au reste, que ce discours ne fût pas tout à fait à la portée de son interlocuteur, il n’en serait pas moins une preuve du zèle et des bonnes intentions de Champlain.