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CATHERINE DE MÉDICIS

lui répondait, disait-on, avec audace, alléguant que les deux batailles qu’il avait gagnées avaient bien soutenu sa couronne.

Charles IX semblait en somme à don Francès un homme de peu d’autorité. Avec les ambassadeurs d’une manière générale, et avec lui-même en particulier, le roi entretenait de bons rapports. En résumé, sa passion était la chasse, avec d’autres exercices physiques, où il se trouvait sous l’influence du maréchal de Damville, deuxième fils du connétable.

L’ambassadeur d’Espagne vient de nommer la reine Elisabeth d’Autriche un ange ! Que ce mot me ravit, quand je pense au beau portrait que fit d’après elle Clouet. Un ange qui aimait tellement son mari qu’elle lui racontait tout ce qu’on lui disait : ce que ce dernier s’empressait, on l’a vu, de rapporter à sa mère. Cela tout le monde le savait ; mais nul ne pouvait s’empêcher de l’aimer. La fille de Maximilien II, autrichienne, est plus qu’à demi espagnole.

Deux femmes espagnoles ne l’avaient jamais quittée, même en Allemagne, et l’avaient suivie en France ; celle qui l’avait élevée se nommait Isabelle Vasquez, l’autre était la Carranza ; mais la troisième dame était une Allemande, la Polverin.

Celle qui gouvernait la maison de la reine était la veuve du connétable de Montmorency, une vieille dame qui conservait les anciennes modes françaises, Madeleine de Savoie. La laideur de la « connétablesse » offensait le jeune et beau visage d’Elisabeth, et le parti-pris qu’elle avait contre les Guises heurtait son sentiment catholique. Il est vrai qu’à cet égard, une autre vieille dame, Mme de Dampierre, belle-mère du comte de Retz, femme orgueilleuse et passionnée pour la maison de Guise, formait un utile contrepoids. La savante comtesse de Retz, était sa fille, la « latino grecque[1] », comme dit don Francès, femme d’un esprit terrible, et libre dans son éducation, élève de l’évêque de Dax[2], qui fut ambassadeur en Turquie, un parfait « hérétique ». La « connétable » s’opposait, à cause de sa légèreté, à ce qu’elle tint la première place auprès de la reine. On croit qu’elle aura cette place, car l’amiral[3] l’aime beaucoup, beaucoup… Le comte de Fiesque[4] est le gentilhomme

  1. C’est la célèbre maréchale de Retz, gouvernante des enfants de France, la dixième Muse, qui sera académicienne et tenait un salon.
  2. Il s’agit de François de Noailles, ambassadeur à Constantinople, à Venise et en Angleterre.
  3. Gaspard de Coligny.
  4. Scipion de Fiesque, comte de Lavagne, marié à Alphonsine Strozzi,