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I

LE TESTAMENT DE DON FRANCÈS



Arrivés à Paris, au terme du voyage, nous voici comme des gens qui, ne sympathisant pas toujours, demeurent liés par les souvenirs communs d’un tour de France.

Ensemble nous venons de suivre beaucoup de routes, de traverser bien des cités, de regarder les aspects variés des contrées de notre pays Les routes furent parfois difficiles, les cités apparurent dans le désordre, les horizons se montrèrent souvent voilés.

Il en est ainsi, depuis des siècles, dans cette France qui n’est pas cependant un pays en excès, mais de valeurs si individuelles, si particulières, qu’il veut ignorer la discipline et la contrainte. Un jour succède à l’autre. Laissons aux prestidigitateurs de l’histoire, aux alchimistes de sublimes pensées politiques, le soin ou la responsabilité de dire les choses comme elles ne furent jamais dans la réalité, mais seulement dans leurs concepts.

Puisqu’il faut quitter ceux que la vie a réunis dans une action commune, nous dirons adieu à don Francès de Alava, devenu notre informateur.

Don Francès devait rester en France jusqu’en 1571, date[1] à laquelle il partit, sans demander congé, de la cour. Pendant cinq ans encore, il continua de s’occuper des affaires de France, pour la satisfaction de son roi, en tenant compte de tous les désirs du Saint-Office pour la recherche des auteurs et des livres hérétiques, surveillant les étudiants espagnols, et en général ses compatriotes vivant en France qu’il dénonçait lorsqu’ils étaient réformés, s’efforçant de les faire arrêter à la frontière. Une autre occupation de don Francès était la répression de la piraterie en Normandie, en Bretagne, en Gascogne, car il avait un vrai service d’espionnage

  1. Les dernières années de son séjour furent pénibles. Don Francès était malade ; il se croyait persécuté, menacé par le poison, on lui avait enlevé son confesseur, on surveillait les gens qu’il voyait et Catherine de Médicis se plaignait à Philippe II de sa dureté. Parti de France le 13 novembre 1571, il gagna par Anvers l’Espagne, après bien des périls.