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DES PIRATES… PAS DES SOLDATS

L’ambassadeur malade était désolé de tout ce qu’il apprenait ; et le maréchal de Vieilleville augmentait son souci en l’infor mant qu’on venait d’envoyer cinquante mille ducats à Malte. La pensée du maître et celle du serviteur se rencontrèrent en quelque sorte, car Philippe II, écrivant à Madrid son courrier pour don Francès, lui donna ces instructions ¹ : — Vous direz à la reine qu’il est certain, d’après notre enquête, que celui qui a organisé l’expédition de la Floride fut l’amiral de France ; que c’est suivant ses ordres que les Français ont construit quelques forteresses et qu’ils avaient l’intention d’occuper certains ports. J’ai commandé de châtier ces Français comme ils le méritaient, car ils voulaient rompre la paix et l’amitié existant entre nos deux pays. Vous devez, en mon nom, prier la reine de faire châtier cet amiral, comme j’aurais procédé moi-même contre n’importe lequel de mes sujets qui aurait entrepris quelque chose contre le roi, mon frère. Vous en ferez bonne instance auprès de la reine et du roi, en leur montrant que nous sommes persuadés que ce n’était pas leur désir qu’on fît cette expédition. De la même façon, le duc d’Albe doit parler ici à M. de Fourquevaux. L’ambassadeur français a répondu qu’il n’avait aucune instruction du roi à ce sujet. Mais on lui a cependant parlé de deux points : on lui a dit que le capitaine Diego Florez était revenu de la Floride, racontant que lorsque Jean Ribaut, chef des Français, voulut se rendre, il demanda au capitaine espagnol d’être traité en soldat. Le capitaine répondit qu’il le considérait comme un corsaire. Le Français répliqua alors qu’il avait des lettres patentes du roi, qu’il pouvait les lui montrer. Le duc d’Albe estimait qu’il avait dit cela de sa propre imagination, car autrement nous devrions porter plainte, non contre l’amiral, mais contre le roi et la reine. 399

On a parlé de la cruauté que montrèrent les Espagnols en passant au fil de l’épée des gens qui s’étaient rendus. Le duc indiqua que les Français qui se trouvaient en Floride n’étaient pas des soldats à la solde du roi, mais de véritables bandits et des pirates, et en même temps des hérétiques qui voulaient propager leurs erreurs dans cette région. Comme les habitants sont simples et non civilisés, l’hérésie pouvait se répandre facilement. Le capitaine espagnol ne pouvait pas agir autrement qu’il a fait ; car si on les avait laissés libres, les Espagnols étant peu nombreux, les 1, La lettre est du 23 février. CATHERINE DE MÉDICIS

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