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LES CONSEILS ROMPUS

Dans ce projet d’union, on avait mis beaucoup d’espoir, bien que le comte palatin eût écrit que pour mener cette affaire à un bon résultat, il convenait d’envoyer une personne ayant des principes plus fermes au sujet de la religion. Ce qui désolait surtout don Francès, c’était de voir que pour réussir dans cette négociation, on allait changer l’âme de Henri, comme on lui avait déjà changé son nom, il y avait juste un an, à Toulouse, mais d’une façon si catholique. A présent, on le livrait aux mains de Mme de Vendôme et de l’amiral, avec lequel il parlait souvent. Jeanne d’Albret le faisait endoctriner ; et déjà il montrait de bonnes dispositions à l’égard des hérétiques. Alors don Francès écrivait : « On m’affirme qu’il n’a plus de serviteurs catholiques ; auparavant, suivant l’ordre de la reine-mère, il assistait à la messe avec beaucoup d’attention ; mais à présent c’est juste le contraire. Le pire est que Carnavalet est en ce moment le gouverneur des deux frères ; on ne fait rien sans lui. » Mais dès qu’on parlait de cela à la reine, comme l’ambassadeur l’avait fait, elle affirmait aussitôt que Charles allait à la messe, se confessait et communiait.

Le jour où l’on créa Damville maréchal, il y eut grande altercation. Condé,

du sang des Bourbons, avait affirmé qu’il pouvait commander aux quatre maréchaux. Le connétable, fier de voir son fils aîné dans la promotion, avait répondu : Et moi, je puis commander à la France entièrel Le prince de Condé se fâcha et répliqua : — Vous ne pouvez pas commander aux princes du sang… Allez essayer de commander en Picardie, vous verrez si on vous laissera faire…

— —Au temps passé, dans les guerres, répondit le connétable, j’ai toujours gouverné les rois François et Henri, et tous les princes qui étaient avec eux. Mais je ne l’ai jamais laissé voir. La leçon avait porté, puisqu’ils se réconcilièrent. Le cardinal de Lorraine et le connétable partageaient cependant cet avis de ne pas rompre les bonnes relations avec le Roi Catholique, et dans tous les cas d’attendre deux ans encore. Pendant ce temps on se procurerait de l’argent ; le roi grandirait, et il pourrait alors, s’il le voulait, faire une guerre et unir tous ses sujets. Et cela semblait, même à don Francès, le moyen le plus sûr : car il a écrit : Les gens d’ici ne s’accorderont jamais ».