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CATHERINE DE MÉDICIS

rait dans un sac à la rivière. Poltrot, l’illuminé, l’Espagnol, le demi-fou qui avait mis hors de cause l’amiral, au cours de son procès, le chargea à l’heure de son supplice. L’accord de l’Ile-aux-Bœufs avait été réalisé. On admit, puisque c’était la voie de la pacification, le retour à l’édit de janvier. Celui de mars 1563 avait fait de la liberté de conscience un droit féodal, reconnaissant dans le manoir la liberté du culte, abandonnant les églises catholiques occupées, et prohibant l’exercice de la religion réformée à Paris. L’amiral dut renoncer à son avance sur Caen ; et il prévoyait déjà toutes les difficultés qui allaient naître avec la reine d’Angle terre. Avant de se séparer, pour la dernière fois M. de Bèze avait célébré la Cène à Sainte-Croix d’Orléans. Et Smith, l’ambassadeur, regardait du côté du Havre et de Calais… L’amiral s’était retiré dans sa maison pour prendre quelque repos, mener, comme il dit, une « vie privée ». On le voyait dans son auditoire de justice, suivi d’une grande troupe de gentilshommes, invoquer le nom de Dieu, proclamant que désormais l’exercice de la justice commencerait par la prière, d’après le formulaire qui fut inscrit sur un tableau. Jean Malot, son ministre, exhorta les magistrats à faire bonne justice, et les sujets à vivre en paix.

Alors ce « rare personnage » qu’était l’amiral avait fait un dis cours (Michel de l’Hospital eût dit une « remontrance » ) énumérant tous les dangers dont Dieu l’avait délivré depuis peu de temps. C’est à sa gloire, et pour l’entretien de la religion, que l’amiral vouait le reste de sa vie. Et il exhorta ses officiers à se comporter comme des gens de bien dans l’exercice de leurs chargés, disant qu’il leur établirait de bons gages afin qu’ils n’eussent occasion d’administrer la justice pour de l’argent, les avertissant de cha tier rigoureusement ceux qui abusaient d’une justice gratuite, Durant son absence, plusieurs avaient maudit Coligny en paroles et en fait. L’amiral oubliait le passé pour leur donner cœur de mieux faire à l’avenir, les priant surtout d’accorder audience à Dieu dont il ferait prêcher la parole, suivant les édits du roi, son souverain seigneur.

L’absence de l’amiral avait mis les affaires de sa maison en bien mauvais ordre. Il demande d’abord à la reine-mère de lui faire payer ses gages en retard. Il assied la taille sur ses sujets, car il n’est pas raisonnable qu’un seigneur en jouisse avec trop d’in