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CHÂTILLON-SUR-LOING

on le voit dans sa vaste correspondance. Calvin dirige, console, conseille, commande, avec ce mélange incroyable de simplicité, et de verbalisme, de patois de Chanaan, de rigueur et de sagesse, et dans ce français qui enchantait ses correspondants. Calvin apparut là comme la sirène. Il recommandait par exemple à l’amiral de profiter de l’école de Dieu, de l’enseignement de l’Écriture qui le confirmerait pour le reste de sa vie à « batailler contre les tentations. » Il proposait enfin à l’amiral, serviteur du roi, le service de Dieu. Et Calvin s’adressait encore à Charlotte de Laval pour la consoler plus tendrement dans la peine que lui causait alors l’éloignement de son mari, et qui devait devenir son bien et son salut. Car celui qui a le vent en poupe demeure au fond malheureux ; et tout notre profit est dans le malheur qu’il nous faut considérer comme « admonestation ». Ces lieux communs, conformes à l’enseignement catholique le plus orthodoxe, réconfortaient deux âmes simples et généreuses, celle du prisonnier abattu et celle de l’épouse aimante. Ils agissaient beaucoup sur l’esprit des femmes, sur Mme de Roye. Et lorsque Catherine de Médicis eut l’immense douleur de perdre Henri II, l’amiral lui avait conseillé sincèrement le remède de la prière, de faire venir un pasteur à Paris, ayant trouvé telle consolation dans la religion.

L’amiral était rentré en France depuis le traité de Cateau-Cambrésis, qui avait mis fin à sa captivité, et à celle du connétable de Montmorency que Henri II supporta si difficilement. Gaspard de Coligny vivait le plus souvent à Châtillon, près de son épouse, dame chrétienne et vertueuse s’il en fut. Car c’est Charlotte de Laval qui confirma surtout l’amiral dans son adhésion à la foi nouvelle. Les récents martyrs, au temps de Henri II, les avaient tous les deux profondément édifiés. Ils découvraient tout le risque, tous les malheurs qui s’attachaient à ceux qui avaient professé la religion nouvelle en Allemagne comme en France le feu, les biens confisqués. Mais Charlotte l’avait reconnu aussitôt : telle a toujours été la condition de l’Église de Dieu, « et ne doutait pas qu’elle y demeurât jusqu’à la fin du monde… >>

— Pour moi et ma maison, nous servirons l’Éternel ! avait répliqué l’amiral.

Et par ses pieux discours, il avait attiré domestiques et amis à la connaissance de Dieu, leur donnant à lire la Bible et des petits