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CATHERINE DE MÉDICIS

Don Francès avait pu observer une telle procession : les cloches sonnaient, le prêtre tenait dans sa main gauche me croix cassée, sous le bras un missel, le bonnet et la burette (pour qu’on ne lui boive pas son vin !) ; et de la main droite, il tenait l’aspersoir et le goupillon. Il allait chantant allègrement, mais tout seul, s’avançant à travers l’église, comme s’il était suivi de cinq cents hommes. Lorsque l’unique vieille qui se trouvait à l’église sortit dehors, don Francès demanda à son hôte pourquoi une telle chose était arrivée. Ce dernier lui répondit que les jeunes prenaient de mauvaises habitudes en aidant à servir la messe, qu’il voudrait, quant à lui, voir achever la race des prêtres dans tout le royaume ! Ensuite on a sonné pour la prédication : alors se sont présentées quelques personnes, la plupart restant sur la place. Et l’on avait dit à don Francès que la grande majorité des gens était athéiste, et ne croyait à rien. Don Francès citait encore l’exemple du prieur du couvent des frères Prêcheurs de Poitiers, qui avait été l’un des plus séditieux durant les guerres civiles passées. On le voyait abandonner, en présence des gens de l’ambassadeur, sa femme et ses enfants, pour rentrer dans son couvent où, l’autre jour, il avait dit publiquement la messe…

Don Francês donnait les renseignements suivants sur les réformés. « Les huguenots ont quatre sortes de ministres. Ceux qui se trouvent auprès des grands princes, on les appelle des superintendants. Ce sont des pasteurs qui encouragent et attirent les partisans ; ceux des villes, qui sont les moins odieux ; les troisièmes, qui se trouvent auprès des gentilshommes importants (comme Gramont ou La Rochefoucauld) : ceux-là ne cessent de fomenter l’hérésie, distribuant des plaquettes ou attirant les gens, et ne se lassent pas de donner des avis par lettres au prince de Condé et à l’amiral. Les quatrièmes, ce sont en quelque sorte ceux de Navarre, le vrai poison. Car ils se trouvent dans une maison qui est très pauvre. Ils renseignent surtout l’amiral et le prince, et tirent des pauvres gens tout l’argent possible pour le développement de l’hérésie… ¹ » Et voici maintenant l’opinion de don Francès sur les femmes de notre pays : « Quant aux femmes de ce royaume, rares sont celles qui ne sont ni huguenotes, ni athéistes ; et même celles 1. Le texte est abrégé légèrement. D gitized by