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CATHERINE DE MÉDICIS

pont de bois nouvellement fait, pour arriver dans les faubourgs de Saint-Jean d’Angely, où les habitants donnent une entrée. Le roi y passe la journée du 11. On gagne le pauvre village et le château de Poursay[1] où l’on déjeune. On couche à Surgères, un autre beau village avec un fort château an milieu des prairies. On déjeune à Lajaune le 13, un autre village, avec une antique église, et l’on couche dans une petite abbaye située dans les faubourgs de La Rochelle.

Les esprits étaient bien anxieux à La Rochelle, car le roi avait fait mander aux habitants de ne pas élire leur maire ; il entendait le leur désigner lui-même, et que ce fût un catholique.

La Réforme était entrée à La Rochelle, en 1558, avec David, aumônier du roi et de la reine de Navarre, qui fit le premier prêche dans la chaire de Saint-Barthélemy.

Le culte rendu en secret sortit plus tard des caves et se fit au grand jour. Bientôt les salles de Saint-Michel avec le logis Gargoulleau apparaissaient bien insuffisantes pour contenir la foule. En 1562, on devait donner la communion générale sur la place du Foin, sous la tente. Alors on pouvait compter à La Rochelle près de six à sept mille réformés, et parmi eux les premiers magistrats, le présidial, une partie de la garnison. Jarnac, gouverneur de la ville, autorisait la célébration des deux cultes côte à côte ; le curé et le ministre s’entendaient sur l’heure des offices. Les réformés chômèrent de leur côté les fêtes catholiques. Ces belles concessions mutuelles ne durèrent pas longtemps. Le parti réformé l’ayant emporté devait naturellement chercher à brimer le parti catholique. Bientôt c’était la messe qu’il fut difficile d’entendre librement dans la petite ville militaire, toujours ouverte à l’Angleterre, si longtemps anglaise, et dont l’esprit particulariste demeurait avant tout fort attaché à ses franchises municipales.

Ces libertés de La Rochelle étaient symbolisées par une antique coutume. Quand un roi entrait dans la ville, on tendait un cordon de soie à travers la porte. Le maire, représentant la cité, se tenait derrière l’entrave symbolique ; il faisait jurer au roi sur l’Évangile, avant d’entrer dans la cité, de conserver les franchises locales. Le serment prêté, le cordon était coupé. Seulement alors le monarque était admis à faire son entrée. Louis XI, lui-même, avait

  1. Poursay-Garnaud.