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CATHERINE DE MÉDICIS

venger des Espagnols. C’est pourquoi, il avait fait armer une belle galère qu’il mettait à l’eau, juste le jour du départ du roi. Charles IX fut le parrain du bateau, qui reçut le nom de Charlotte. Tous

ces armements se faisaient, observait don Francès, sous le prétexte de l’expédition de Floride. En réalité ils étaient destinés à la course sur les vaisseaux espagnols au retour des Indes¹. A Dieppe, à Fécamp, on armait d’autres navires. Les sept navires déjà partis avaient été signalés en mai vers les côtes d’Angle terre, d’où ils voguèrent accompagnés d’un corsaire anglais… Ce qui irritait tout autant en ces jours don Francès, c’était de voir que Catherine recommençait déjà, comme il disait, « ses pratiques ».

Ainsi la reine-mère l’avait fait chercher, lui demandant s’il était content des résultats de l’entrevue. Elle lui murmura à l’oreille : — Ne me tenez pas pour une femme de bien si je n’accomplis ce qui a été décidé avec la reine ma fille. Je le ferai, mais il faut observer un grand secret, car plusieurs paraissent déjà troublés et mécontents, craignant pour ce qui les attend… Et le cardinal de Bourbon avait pressé la main de l’ambassadeur, sans rien dire, lui laissant comprendre que tout allait bien pour le moment. Mais don Francès craignait surtout que les hérétiques demeurant à la cour ne la fissent revenir sur sa décision. Quant au petit prince de Béarn, l’Espagnol voyait bien qu’il avait quitté la cour pour se rendre sur ses terres, mais afin de donner du cœur aux réformés. Le jeudi, la famille royale s’embarque sur l’Adour pour déjeuner à Urt, où il n’y a que deux maisons ; on va coucher dans une aimable contrée du Béarn, à Bidache, le château du seigneur de Gramont. Quelle chaleur ! Plusieurs hommes et des chevaux tombent frappés d’insolation ! Le seigneur de Gramont est Antoine d’Aure, l’un des chefs du parti huguenot, colonel, qui avait amené à Orléans six mille Gascons, tous vieux soldats, et bons s’il en fut, qui ne savaient que faire depuis le traité de Cateau-Cambrésis ! M. de Gramont est un chef valeureux et un homme aimable. Ses convictions religieuses ne sont peut-être pas assurées. On le verra du moins redevenir catholique ; il sera 1. L’Amérique.

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