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CATHERINE DE MÉDICIS

fine barbiche retroussée en accent circonflexe sur le W de la longue barbe à deux pointes. Le duc d’Albe porte le bâton de commandement du soldat qui se détache sur la cuirasse brune. Le profil des médailles montre la même rare distinction, l’ardente et froide volonté. Le duc d’Albe écrasera l’hydre aux trois têtes taillées dans la petite statue de bois qui le représente. Ces trois serpents sont : Elisabeth d’Angleterre, le pape et l’électeur de Saxe. On n’est pas plus éclectique. Mais la figure caricaturale donne une indication intéressante. Alvarez de Toledo n’avait été qu’un soldat et un serviteur d’esprit fort indépendant ainsi qu’il convient à la vraie noblesse, comme Philippe II l’était lui-même devant ses hidalgos et ses villes. Dévoué à son maître jusqu’au sacrifice, le duc d’Albe protestait envers certains excès du pouvoir royal. Fils de l’Église, il s’insurgeait contre l’ingérence ecclésiastic réclamait àu pape la réforme des abus. Ainsi il lui avait écrit : « Je ne fais pas la guerre à Paul IV comme au vicaire du Christ, mais comme à un ennemi acharné du Roi Catholique, et j’employerais tous les moyens les plus rigoureux pour le forcer d’être digne du titre de Sainteté que les fidèles lui donnent. >> Le duc d’Albe avait conseillé la vente des biens de l’Église pour les besoins de la guerre, recommandé l’intervention diplomatique dans l’élection du nouveau pontife. Quand il réclamait la réforme de l’Église, le duc usait d’expressions énergiques, dignes d’un partisan de Luther. Il disait que l’avarice et les abus de la curie étaient les causes des progrès des réformés, qu’une vie exemplaire des religieux demeurait seule capable de rendre courage aux fidèles. Le duc d’Albe savait l’incapacité des clercs ordonnés, leurs mœurs corrompues, les désordres dans la conduite des gens du chapitre des cathédrales. Toute sa vie le duc traita les évêques d’une manière hautaine. Son action était avant tout politique et militaire ; et lorsqu’il combattait pour le Christ, il le faisait au nom de son souverain, et non pas au nom de l’Église. disait : « J’adorerais de bien mauvais cour toutes les idoles faites de la main des hommes ; mais le roi, fait par Dieu, volontiers. » Si par ses talents militaires et d’organisateur, le duc d’Albe s’était imposé à Charles-Quint (dès l’enfance, il avait appris par cœur, avec le latin, les préceptes du De re militari de Végèce), celui-ci I avait recommandé à Philippe II d’une manière pleine


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