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CATHERINE DE MÉDICIS

leur fait aux parlementaires de Bordeaux qui s’étaient « débauchés », ce qui était inexcusable dans un Parlement relativement jeune¹. Il savait que les opinions des gens de bien n’y comptaient pas ; il avait reçu des plaintes adressées sur les meurtres et les pilleries commis dans ce ressort, connaissait les dissentiments qui régnaient entre les gens du Parlement : « Voicy une maison mal réglée ; c’est vous aultres qui fault que vous en rendiez compte…>>. La première faute était la désobéissance portée au roi en n’enregistrant pas les ordonnances présentées : « Si vous avez des remontrances à luy faire, faites les y au plus tost, et il les oyra… Vous luy ostez sa puissance royale quand vous ne voulez obéir à ces ordonnances royales, qui est pis que de luy oster son domaine… » Le chancelier disait encore : « Votre prudence doit se limiter à juger les procès, non à vous estimer plus sages que le roi, la reine ou son conseil ». Il tirait une leçon du mot que Varron, Romain, avait prononcé, et qui lui semblait si bien approprié au pays des oignons « Vos prédécesseurs sentoient aux aulx et oignons, mais ils avoient l’estomac bon et l’haleine bonne ». C’est que les prédécesseurs des gens du Parlement avaient bon sens et entendement.

Le chancelier répétait encore le mot d’Horace : qu’il faut manier doucement un cheval pour ne pas lui apprendre à ruer. Attention à vous, ou gare aux ruades royales ! Il disait encore : Vos arrêts ne sont pas au-dessus des ordonnances. Je suis le chef de la justice ; j’ai été président. Je sais mon métier. Le mal vient de vos divisions, de vos ligues. J’ai vu vos registres, vous en venez parfois aux injures, et jusqu’à vous battre et vous menacez les gens de votre justice. Vous êtes sous la coupe des gouverneurs. Vous faites des mariages par force : « et quand on sçait quelque héritière c’est pour monsieur le conseiller ». Ceux-là, il ne les nommera pas !

Le chancelier évoquait, avec la même simplicité majestueuse, les guerres civiles de Rome : « C’estoit le commencement que le sang des citoyens feut respandeu, et depuis, le plus fort tuoit le plus foible ». « Il ne fault jamais défendre un meurtre faict de voye de faict ». Enfin le chancelier semblait craindre « qu’il n’y eut céans de l’avarice. » Il disait sans vergogne : ayez les mains nettes. On dit qu’il y a de grands présents à la cour, et que 1. Établi par Charles VII et confirmé par Louis XI. D gitized by