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DE MONTAUBAN À AGEN

endroits d’où l’on peut tirer de bons chevaux. Suivant leur convention, il s’agit là de centres où l’on fabriquait, où l’on répandait des livres hérétiques destinés à perdre les âmes des habitants de la Navarre, et qui pouvaient contaminer un jour les purs croyants de l’Espagne. Car ces renseignements, don Francès ne manquait pas de les envoyer au grand inquisiteur, l’archevêque de Séville. Monluc triomphe en ces jours. Le Gascon est persuadé qu’il est le promoteur de l’entrevue qui va se tenir à Bayonne. Il en attend tout. Mais que ne dit pas Monluc ? Il vient à l’instant même de rapporter à don Francès toutes les carresses et les honneurs qu’il a reçus de Catherine de Médicis et de Charles IX. Monluc serre la main de l’ambassadeur avec effugion

— Tenez, je pourrais vivre trompé par tout cela jusqu’à l’entrevue du roi mon maître avec la Reine Catholique, comme peuvent l’être Bourdillon et Cipierrel Mais si je vois qu’ensuite on ne prend pas une décision pour en finir avec tous les hérétiques, je passerai au service du Roi Catholique pour lui dire comment on peut les achever. Car si cette entrevue n’apporte pas l’ordre, tout est perdu ! Don Francès écoutait ces paroles d’une oreille distraite : Monluc était tellement léger dans ses propos ! Mais il constatait aussi que le Gascon jouissait d’une grande réputation, et que ses hommes le suivaient avec beaucoup d’affection. Monluc lui demanda encore si le comte d’Egmont était hérétique

l’ambassadeur répondit qu’il était un bon catholique, très

estimé du roi d’Espagne. Or Monluc tendit une lettre qu’il venait de recevoir d’un ami de Bordeaux : le comte d’Egmont n’avait pas été à la messe. Don Francès se prit à rire. Tout cela ne tenait pas debout.

C’est Monluc cependant qui était bien renseigné. Le lendemain du baptème de la fille de Monluc, on se rendit au gravier, sur les bords de la Garonne, où, non loin des piles d’un vieux pont, on tirait à l’arbalète. Sur la rive, le populaire jugeait des coups. Ce fut la dernière fête avant le départ de la cour. On monta, le 21, sur le bateau pour descendre à Port SainteMarie, petite ville sur la Garonne et gagner ensuite le château d’Aiguillon, la vieille bastide où l’on arriva le mercredi 27. Il y eut une entrée.