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LES MASQUES

rien fait au préjudice du roi. Les portraits furent repeints, ce qui consterna les catholiques : « Si tout cela continue, après l’entrevue il ne nous restera qu’à tendre nos cous, et à nous laisser couper la tête ! »

Les réformés n’étaient pas moins désespérés. Comme ils étaient venus prier le roi de leur accorder des prêches, un gentilhomme huguenot dit : « Trois fois, sire, je vous l’ai demandé, et vous me l’avez refusé. Alors, permettez-moi de vendre mes biens et de partir avec ma famille à l’étranger pour sauver nos âmes ! >> Le roi avait répondu que le gentilhomme réformé serait libre de s’en aller, mais que ses biens lui appartiendraient, car il pouvait en disposer à son bon plaisir. Quelques jours auparavant, on avait publié dans la ville de Toulouse une ordonnance interdisant de manger de la viande pendant le carême. Un membre du conseil, favorable aux réformés, un hérétique suivant don Francès, avait déclaré que l’ordonnance était contraire à l’édit d’Orléans, suivant lequel chacun pouvait agir en cela d’après sa propre conscience. La nouvelle arrivait qu’en Normandie une bande de huguenots ayant pillé quelques églises, le gouverneur de Dieppe leur était tombé dessus, faisant des prisonniers. Les réformés les avaient délivrés par la force, tuant ceux qui les gardaient. La chose fut discutée au conseil où la reine-mère déclara qu’il n’y avait pas d’autre remède à ces violences que de demander aux gouverneurs de châtier immédiatement les huguenots dans des cas de ce genre. Les cardinaux et le connétable de Montmorency l’ayant appuyée, le chancelier se leva : Madame, la justice doit être administrée avec pitié. Le roi votre fils a besoin d’hommes. Il faut considérer les inconvénients qui pourraient se produire si on exécutait ce qui vous paraît bon aujourd’hui.

→ Il est nécessaire de mettre bas les masques ! répondit la reine. Mais c’est l’opinion du chancelier qui l’emporta cependant. On écrivit aux gouverneurs, non pas de sévir, mais de fermer les yeux. Le secret de cette douceur, de cette dissimulation, don Francès croyait bien en savoir la raison : la reine-mère avait peur. L’ambassadeur reçut en effet par l’un de ses espions, la copie d’une lettre que l’amiral venait d’adresser à Catherine de Médicis. Coligny l’avertissait, en bon sujet du roi, que les deux tiers du royaume étaient formés de huguenots, si fermes qu’il était imposD gitized by