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CATHERINE DE MÉDICIS

clémence envers eux, leur donnant sa parole qu’ils seraient sévè rement châtiés.

Comme il arrive, le compromis ne donnait satisfaction à personne. Les catholiques faisaient observer qu’à Meaux, où depuis trente ans on faisait publiquement des prêches huguenots, un hérétique fort connu avait été maintenu comme gouverneur. Les réformés de Tarascon s’exprimaient d’une façon si insolente que don Francès n’osait le rapporter à Sa Majesté Catholique. Dans les rues, sur les places publiques, ils touchaient leurs épées, disant que le fer leur ferait justice au lieu de l’édit d’Orléans rompu. Mais ces menaces étaient emportées par la joie générale, car à la cour on ne faisait que danser. On mit à profit les trois jours passés à Tarascon pour faire traverser le Rhône, sur un pont de bateaux, au train et aux bagages, opération périlleuse en cette saison. Sur la rive droite du Rhône, en face de Tarascon la catholique, s’élevait Beaucaire, la ville hérétique. Ici les passions étaient plus vives. Beaucaire avait connu la dure occupation de la garnison catholique de Villars, puis la petite ville marchande était tombée, tour à tour, aux mains des religionnaires de Nîmes après avoir subi l’assaut et les camisades des gens de Tarascon. Aujourd’hui, on se défiait d’une rive à l’autre. Et pendant le séjour même de Charles IX les gens de Tarascon entendirent à minuit ceux de Beaucaire les interpeller : << Eh vous autres de Tarascon, dites au comte de Tende qu’il fasse observer l’édit, car s’il va au contraire, il le payera cher ! Et si le roi Charles lui commande de faire autre chose, dites-lui qu’il aille manger sa soupe, et ne parle pas de cette matière ; car s’il est si passionné contre les huguenots il pourrait, lui aussi, avoir à s’en repentir ! >> Et les gens de Beaucaire prononcèrent contre la reine d’autres paroles injurieuses que don Francès ne rapporte pas ; mais il ajoute : « Et je sais qu’ils veulent la tuer. » > Ce qui échappe naturellement à l’Espagnol, c’est la facilité que les Français, qui ne sont pas d’accord, ont de causer entre eux. Il est certain en ces jours que le connétable de Montmorency s’était prononcé nettement contre les réformés ; et ceux-ci lui portaient une « haine étrange ». Comment le connétable pouvaitil dans ces conditions se montrer à ce point l’ami du chancelier Michel de L’Hospital ? Or, il y avait trois jours, ils s’étaient disputés au sujet des prêches en Provence. Le connétable avait dit au chancelier : « Notre roi est cathoD gitized by